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L’utopie de la «Société des
loisirs» est devenue anathème. Les valeurs de
l’économie de pleine croissance et du progrès continu
ont vaincu. Nous ne profiterions pas collectivement des
gains de temps incalculables rendus possibles par les
développements technologiques.
Au XXI siècle, les grandes organisations déplorent un
taux d’absentéisme jamais vu dont plus de 50% est
attribuable au «burnout» et à l’épuisement
professionnel. Les antidépresseurs sont les médicaments
les plus remboursés par les assureurs. De nouveaux mots
font leur apparition : le «présentéisme», désignant la
souffrance d’être physiquement sur le lieu de travail
mais sans motivation. Quand à «la mort par surmenage»
récemment nommée au Japon, elle se passe de définition…
En réaction, après le «Cocooning», le «Slow Living»
est une autre tendance. L’émission Vous-êtes-ici, à
Radio Canada citait cette semaine une étude du
philosophe historien Théodore Zeldine concluant que 90%
des travailleurs ne sont simplement plus heureux au
travail. Aucun statut ni aucune récompense financière ne
pourront compenser le manque d’humanité ressenti dans le
milieu de travail, explique t-il.
Le philosophe grec Sénèque avait l’habitude de valoriser
«l’homme qui a du loisir». Il évoquait ainsi la
discipline qui consiste à éviter de dilapider tout son
temps dans les affaires mondaines et celles de la survie
matérielle, au détriment de toute vie intérieure ou du
travail concret pour réaliser ses aspirations profondes.
L’individu est seul maître de l’usage de son temps. Si
par crainte qu’on le lui vole, il choisissait de le
saboter, en passant par exemple 27 heures par semaine
devant la télévision, ce serait comme un suicide.
Comme Sénèque, nous ne croyons pas que la vie soit
courte puisque ce n’est pas une question de quantité
mais de qualité.
Que
fait chacun de son temps libre ?
-Denis Bricnet |