La Fragilité du Dialogue

dans une société compétitive

 


 
 

 

 

Que faire de la fragilité dans une société compétitive? Tel était le thème du colloque international de théologie et de spiritualité, qui se tenait le 17 octobre, à l’Université Laval, sous l’égide de la revue La Chair et le Souffle.

 

L’un des conférenciers invité, a proposé une réflexion fort lucide sur la fragilité du dialogue dans uns société compétitive. S’inspirant de Platon, Jean-François Malherbe a souligné des pré-requis sans lesquels le dialogue semble improbable. Selon lui, Socrate serait à la source de la première théorie du dialogue.

 

Reprenant habilement des extraits du Gorgias dans lesquels Socrate parle du dialogue lui-même, ou la communication entre deux intelligences, Malherbe résume en sept points ces conditions du dialogue que notre société semble fragiliser.

 

Le dialogue :

  1. Est une recherche commune entre deux être authentiques.

  2. Suppose la bienveillance mutuelle.

  3. Implique que chacun parle à son tour et ne se défile pas. Remarque : Notre société privilégie le pouvoir lui-même que l’autorité morale. Il en résulte une tendance dans le discours à négliger la cohérence et la sincérité pour chercher d’avantage ce qu’il faut dire pour plaire ou pour obtenir ce qu’on désire.

  4. Consiste à chercher un accord. Vraisemblablement, on chemine en se mettant d’accord sur nos points précis de désaccord. Intolérante à la fragilité, la société obsédée par la recherche d’une vérité politiquement correcte, nationalisable et exportable, cherche des accords prématurés en survalorisant le consensus.

  5. N’est possible qu’entre des experts, au sens Socratique. C'est-à-dire des gens lucides sur la valeur et les limites de leurs propres connaissances.

  6. Avance par la réfutation plus que par la confirmation. La pensée unique inhibe la recherche. Or pour accepter de voir ses opinions réfutées, fragilisées, l’individu doit avoir suffisamment d’humilité pour ne pas s’identifier totalement à ses opinions.

  7. N’est possible qu’entre personnes qui préfèrent subir l’injustice plutôt que de la commettre. Le dialogue exige le pardon immédiat des propos qui nous auraient offensés. Sans cette vertu, la contre-attaque romprait le charme et la communication tomberait au niveau animal de la lutte pour la survie des personnalités.

Le dialogue apparait donc comme un chemin fragile. Pour parcourir ce chemin, l’égo doit accepter volontairement d’assumer sa propre fragilité.

 

Paradoxalement, il faut pour cela que l’individu ait une certaine force intérieure, comme une confiance favorisée par sa propre authenticité. Sans cette force intérieure qui n’exclut pas la fragilité, les hommes manipulent, dominent ou se soumettent; mais jamais ne dialoguent.


-Youri Pinard

   

26 octobre 2009

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